Après la Janteloven, le code de conduite nordique, voici une autre règle sociale typique de la Norvège : l’Allemannsretten. Signifiant littéralement « le droit de tout le monde », ce code garantit l’accès à la nature à quiconque le désire. Dépendant toutefois de règles de respect et de sécurité, il est étroitement lié à un autre concept : le friluftsliv. Pouvant être traduit par « vie à l’air libre », ce dernier favorise les activités de plein air, au cœur de la nature, aussi bien en été qu’en hiver.
Les origines de l’Allemannsretten sont très anciennes et remontent à des octrois auxquels bénéficiaient les Norvégiens. Ce droit à la nature a même été inscrit, en 1957, dans la loi régissant les loisirs de plein air. Il est ainsi autorisé à tout le monde de randonner, de camper et de pêcher n’importe où dans un espace naturel, à condition de respecter certaines règles.

Les terrains concernés par ce droit ne doivent pas être clôturés ni cultivés, ce qui comprend donc la plupart des rivages, des montagnes, des marais et des forêts. Les terrains privés clairement délimités sont ainsi exclus de ce droit et ne peuvent pas être traversés ni occupés par n’importe qui. De plus, les randonneurs et campeurs sont priés de respecter la nature et de laisser l’endroit tel qu’il était à leur arrivée lorsqu’ils le quittent.
A moins d’une contre-indication, stipulée par un écriteau, il est légal de camper où l’on veut dans la nature, à condition de s’installer à au moins 150 mètres de la première habitation. Il est cependant recommandé de demander la permission au propriétaire, surtout s’il on souhaite rester plus d’une nuit au même endroit. Cette règle est valable aussi bien pour une tente que pour un camping-car ou un van. Mais on peut s’en dispenser si le lieu est très isolé.
S’il n’est pas autorisé de faire du camping sauvage, les possibilités d’accueil dans des campings sont nombreuses. Pour tous les prix et tous les types d’hébergement et d’emplacement, les campings norvégiens offrent des cadres de vie idylliques, proches des beautés de la nature. Ils disposent aussi du confort nécessaire, comme une cuisine et des sanitaires.
Les raisons qui motivent certaines zones à être interdites aux campeurs sont avant tout environnementales. Si elles sont un habitat pour des animaux sauvages protégés, il n’est évidemment pas autorisé d’y camper afin de ne pas les déranger et les mettre en danger. Aussi, en été, les éleveurs laissent généralement pâturer en liberté leurs troupeaux, souvent des moutons ou des rennes dans le Nord de la Norvège. Il est alors conseillé de rester à distance pour ne pas les perturber. Pour les mêmes raisons, les chiens doivent être tenus en laisse.
Quant aux feux de camp en pleine nature, ils sont interdits du 15 avril au 15 septembre, sauf sur un site où le risque d’incendie est limité, comme une plage ou un lieu empierré. Il est donc préférable d’utiliser un réchaud ou un barbecue, lesquels peuvent toutefois être prohibés en cas de sécheresse. De plus, on ne doit pas couper soi-même du bois mais plutôt ramasser des branches et des brindilles sèches tombées au sol. Enfin, il faut s’assurer que le feu ne se propage pas et qu’il est bien éteint au moment de partir.
Cependant, il est courant de trouver des refuges un peu partout, dans lesquels il est libre de s’arrêter pour se reposer et manger. Ce sont de petites cabanes en bois dotées en général d’un poêle à bois, bien agréable pour se réchauffer ou faire la cuisine, et vivre ainsi une expérience « koselig ». Ces refuges sont entretenus par des bénévoles, qui procèdent aux réparations et apportent des bûches indispensables à l’alimentation du poêle. Mais comme avec la nature, il est primordial de respecter les lieux.


La Norvège étant également gâtée par la nature, il est tentant de s’adonner à la cueillette et à la pêche. Heureusement, il n’existe pas de restriction pour ramasser des baies sauvages, telles que les myrtilles, les groseilles, les fraises des bois ou les framboises. Il en est de même pour les champignons, les plantes comestibles et les fleurs. Seules les mûres arctiques, ou cloudberries, sont soumises à des règles dans le Nord du pays.
Concernant la pêche, elle est praticable en mer sans permis, le long du littoral et dans les fjords. En revanche, pour la pêche en eau douce, dans les lacs et rivières, il est nécessaire d’acheter un permis ainsi que de désinfecter son matériel entre deux sites de pêche différents. Cette règle permet d’éviter la propagation de maladies d’un plan d’eau à l’autre.
Pour profiter pleinement de l’Allemannsrett, des itinéraires balisés et sécurisés peuvent être suivis. Le site UT.no fournit des informations importantes pour tous les randonneurs, qu’ils soient à pied, à skis, à vélo ou en kayak. Il répertorie aussi toutes les « hytter », des maisons isolées qu’il est possible de louer pour des excursions dans la nature.
A l’heure de l’écologie, se reconnecter avec la nature sans l’abîmer semble vital pour de plus en plus de monde. Pouvoir en disposer dans le respect est un droit à saisir. C’est ce que font les Norvégiens depuis des siècles.
