La politique en Norvège

A l’occasion de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle française, voici un aperçu de la vie politique en Norvège. Si le pays est une monarchie depuis plus d’un millénaire, le souverain n’a qu’un rôle symbolique et ne s’immisce pas dans la politique du royaume. Le pouvoir est exercé par le premier ministre et son gouvernement, tandis que le parlement (photo en une), appelé Storting, assure la représentation du peuple et vote les lois. De plus, il n’y a que deux types d’élections : les élections municipales et régionales, qui renouvèlent les maires et les présidents des comtés, et les élections législatives, qui déterminent la composition du parlement et, par conséquent, le nom du premier ministre et la couleur du gouvernement. C’est à ce seul moment que le roi, ou la reine, intervient et valide la nomination du premier ministre. Ce dernier est généralement le chef du parti ou de la coalition qui sort vainqueur.

Le Storting est constitué de 169 députés, élus pour quatre ans, dont 150 sièges sont attribués à la proportionnelle pour 19 circonscriptions. Ces subdivisions correspondent aux anciens comtés, lesquels ont été ramenés à 11 après la fusion de certains d’entre eux en 2020. Entre 4 et 19 sièges sont accordés par circonscription en fonction de leur population. Les 19 sièges restants sont complétés d’après les résultats du vote populaire et servent à compenser l’écart créé par la méthode proportionnelle.

Bien que le fonctionnement de la vie politique norvégienne puisse paraître simple par rapport à d’autres pays comme la France, cela n’empêche pas la Norvège d’arriver en tête du classement de l’indice mondial pour la démocratie. La politique du royaume est également égalitaire et inclusive, puisqu’elle présente autant de femmes que d’hommes siégeant au Storting ou composant le gouvernement, ainsi qu’un nombre non négligeable de parlementaires issus des minorités sexuelles et ethniques.

Après les élections législatives de septembre 2021, c’est le Parti travailliste qui a remporté le plus de sièges. Grâce à son alliance avec le Parti du centre, il a obtenu la majorité pour former un gouvernement. Jonas Gahr Støre, le président du Parti travailliste, a ainsi été nommé premier ministre, succédant à Erna Solberg, issue du Parti conservateur et première ministre depuis 2013. Les deux formations politiques ont régulièrement alterné en tant que parti majoritaire au cours de l’histoire.

Les partis politiques présents au Storting depuis 2021 sont les suivants, dans l’ordre de leur importance en nombre de sièges :

  • Le Parti travailliste ou Arbeiderpartiet (Ap) est un parti de centre gauche, considéré comme le plus important de Norvège. Il a été créé en 1887. Son idéologie est sociale-démocrate. C’est le parti de Jonas Gahr Støre, l’actuel premier ministre.
  • Le Parti conservateur ou Høyre (H) est un parti de centre droit, considéré comme le deuxième plus important de Norvège. Il a été créé en 1884. Son idéologie est libérale-conservatrice. C’est le parti de l’ancienne première ministre Erna Solberg.
  • Le Parti du centre ou Senterpartiet (Sp) est un parti centriste, fondé en 1920, qui à l’origine était agrarien. S’il n’est plus officiellement le parti des paysans, il se veut défenseur des valeurs humaines, de la décentralisation et du développement économique.
  • Le Parti du progrès ou Fremskrittspartiet (FrP) est un parti de droite, positionné à droite du Parti conservateur. Il a été fondé en 1973. Son idéologie est nationale-conservatrice. Il est le parti de droite le plus radical présent au parlement.
  • Le Parti socialiste de gauche ou Sosialistisk Venstreparti (SV) est un parti de gauche, positionné à gauche du Parti travailliste. Il a été créé en 1975 et est issu du Parti communiste norvégien. Son idéologie est socialiste.
  • Le parti Rouge ou Rødt (R) est un parti d’extrême gauche, positionné à gauche du Parti socialiste. Fondé récemment en 2007, il est issu de formations communistes et marxistes. Il est le parti de gauche le plus radical présent au parlement.
  • Le parti Gauche ou Venstre (V) est un parti centriste, voire de centre droit. Créé en 1884, il est le plus ancien de Norvège. Son idéologie est sociale-libérale, plutôt à gauche dans le domaine social et plutôt à droite dans le domaine économique. Parti d’importance à ses débuts, il ne l’est plus depuis plusieurs années.
  • Le Parti populaire chrétien ou Kristelig Folkeparti (KrF) est un parti centriste créé en 1933. Issu de la morale chrétienne, il est plutôt conservateur dans le domaine social et plutôt à gauche dans le domaine économique. Ses membres et partisans ne sont pas forcément religieux ni chrétiens.
  • Le Parti de l’environnement-Les Verts ou Miljøpartiet-De Grønne (MDG) est un parti de centre gauche écologiste. Il a été fondé en 1988. Ses principes écologistes sont souvent repris par d’autres partis traditionnels.
  • Le parti Focus patient ou Pasientfokus (PF) est un parti régionaliste créé en 2021 en soutien à l’hôpital d’Alta, dans le Finnmark, un comté du Nord de la Norvège. Seulement présent dans cette circonscription, il a réussi à obtenir un siège au parlement.

La politique norvégienne impose une transparence totale et oblige ses personnalités à être des modèles moraux. La moindre enfreinte à la loi, même survenue plusieurs années auparavant, peut les mener à démissionner immédiatement de leurs fonctions et à ne plus revenir en politique avant longtemps. Par exemple, en novembre 2021, la présidente du Storting Eva Kristin Hansen a dû démissionner de son poste après des révélations sur son logement de fonction. Entre 2014 et 2017, elle bénéficiait d’un logement de fonction en tant que parlementaire alors qu’elle possédait déjà son propre appartement, ce qui était contraire aux règles. Ainsi, seulement un mois après sa nomination, elle a choisi de céder sa place.

Mais ce qui peut paraître le plus étonnant d’un point de vue extérieur dans la politique norvégienne, c’est le certain détachement dont font preuve les hommes et femmes politiques du pays. Ils n’hésitent pas à se mettre en scène ou à agir avec légèreté sans que ce ne soit honteux ou ridicule pour l’opinion publique. En 2020, par exemple, les ministres du gouvernement ont enregistré une vidéo où ils dansaient à l’occasion de la fête nationale du 17-mai. Le ministre de la culture et de l’égalité de l’époque, Abid Raja, a alors impressionné pour son incroyable déhanché.

Lors des débats télévisés, les participants attendent leur tour pour parler et ne se coupent presque jamais la parole. De plus, s’ils doivent débattre à deux, ils jouent d’abord à pierre-feuille-ciseaux pour déterminer qui parlera le premier. Et lors d’un débat organisé à l’approche de Noël, les représentants des quatre partis les plus importants ont volontiers porté un pull de Noël à la place des traditionnels costumes et tailleurs. Ils se sont aussi coiffés de chapeaux et de serre-tête fantaisistes appropriés, tandis que l’un d’eux a même osé une perruque blonde.

Juledebatten (le débat de Noël) sur la chaîne publique NRK le 23 décembre 2020 avec la première ministre Erna Solberg (H), Jonas Gahr Støre (Ap), Trygve Slagsvold Vedum (Sp) et Siv Jensen (FrK).

Enfin, certains d’entre eux ont pu participé à des émissions de télévision que l’on pourrait qualifier d’incongrues. Ainsi, ces deux dernières années, le programme Maskorama, l’équivalent de Mask Singer, a accueilli Trygve Slagsvold Vedum, leader du Parti du centre et actuel ministre des finances, dans le costume de l’épouvantail, puis Abid Raja, encore lui, dans le costume du lutin. Tous les deux n’ont pas atteint la moitié de la compétition. D’autres hommes et femmes politiques ont aussi participé à Skal vi danse, le Danse avec les stars norvégien, ou à Ikke lov å le (Il n’est pas permis de rire), un programme où deux personnalités se racontent des blagues à tour de rôle et doivent se retenir de rire.

Si la Norvège est un des pays les plus démocratiques au monde, cela ne dispense pas les acteurs de la politique de ne pas toujours se prendre trop au sérieux. Ce mélange de transparence, de moralité et de légèreté, à l’équilibre pas forcément facile à maintenir, peut sembler surprenant mais fait partie d’un état d’esprit unique.

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